hier j’ai été agréablement surpris par la visite de M. Salles qui, je crois, avait eu une lettre de toi. J’étais tout à fait bien quand il est venu donc nous avons pu causer avec calme. Mais j’en suis tout confus qu’il se soit dérangé pour moi, à plus forte raison parceque j’espère pour un temps avoir retrouvé ma presence d’esprit. Pour le moment il me semble que le mieux sera de continuer encore ici. je verrai ce que dira M. Peyron lorsque j’aurai occasion de lui parler; il dira probablement qu’il ne peut absolument rien garantir d’avance, ce qui me parait assez juste.
Aujourd’hui j’expédie quelques toiles,1 les suivantes:
le même champ du faucheur de cet été3 et peut y faire pendant; je crois que l’un fera valoir l’autre.
le ravin. C’est l’etude faite par une journée de
mistral – j’avais calé mon chevalet avec des grosses pierres4 – le tableau de cela n’est pas sec, c’est d’un dessin plus serré 1v:2 et il y a davantage de passion contenue et il est plus coloré.–5
Cela peut aller avec une autre étude de montagnes, effet d’été, avec une route sur l’avant plan et une baraque noire.6
Les oliveuses – j’avais destiné ce tableau-là à la mère
et la soeur pour qu’ils aient une chôse un peu étudiée.7 J’en ai encore pour toi une repetition8 et l’etude (plus colorée avec des tons plus graves) sur nature.9
Veuille ne pas les regarder sans les monter sur chassis et les encadrer de blanc.
C’est à dire tu decloueras d’autres toiles et monteras ceux ci sur les chassis un à un si tu veux, pour te rendre compte de l’effet. Car il faut aux colorations absolument le repoussoir du cadre blanc pour juger de l’ensemble. Ainsi la pluie, les oliviers gris, on ne peut guere les voir sans le cadre.
Cela comblera un peu le vide des toiles parties pour les Vingtistes – tu demanderas à Tanguy de declouer d’autres toiles et de monter celles ci sur les chassis pour que cela sèche bien à fond.
Tu parles dans ta lettre précédente19 des dessins de Hugo – je viens de voir un volume de l’histoire de France (illustrée) de Michelet. Là j’ai vu des dessins de Vierge admirables qui étaient tout à fait comme du Victor Hugo. des chôses étonnantes.20 Connais-tu cela. Lorsque tu verras m. Lauzet demandes lui un peu s’il les connait, cela ressemble aussi au talent de Hervier21 mais plus complet avec des figures,
1r:4 des effets plus dramatiques – cela ressemble aux illustrations pour la vie de Fréderic le grand de Menzel22 encore.– Bien curieux.
Je crois que Vierge est aussi allé à Charenton23 mais comme il a travaillé celui là. Boggs dans le temps avait de lui une magnifique gravure sur bois publiée probablement par l’Illustration, les bains de mer – une foule d’hommes et de femmes24 – dessin à la Doré qui un jour a très bien fait juste le meme motif dans une page publiée aussi par l’Illustration25 – mais alors chez Vierge il y a en plein l’exécution grasse de Daumier.
J’espère que la santé de Jo et la tienne vont bien et que tu n’aies plus aucune inquiétude à mon égard.
Ecris moi si tu peux bientôt après avoir reçu les toiles. Bonne poignée de main à toi et ta femme en pensée.