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829 To Theo van Gogh. Saint-Rémy-de-Provence, on or about Thursday, 19 December 1889.

metadata
No. 829 (Brieven 1990 830, Complete Letters 617)
From: Vincent van Gogh
To: Theo van Gogh
Date: Saint-Rémy-de-Provence, on or about Thursday, 19 December 1889

Source status
Original manuscript

Location
Amsterdam, Van Gogh Museum, inv. no. b666 V/1962

Date
In letter 830 of 22 December, Theo confirms the receipt of the paintings mentioned in the present letter as having been sent ‘yesterday’ (l. 26). Because there is nothing to indicate how long it took for this consignment to reach Paris, we assume that it was about four days. We have therefore dated the present letter to about Thursday, 19 December 1889.

Additional
The order (l. 76) Van Gogh enclosed for canvas and paint has not been preserved.

original text
 1r:1
Mon cher Theo,
Merci bien de ta dernière lettre,1 je suis bien aise que ta santé et celle de Jo vont bien et pense bien souvent à vous autres.
C’est très intéressant ce que tu racontes d’une publication de lithographies coloriées avec un texte sur Monticelli,2 cela me fait franchement un plaisir très vif et je serais très curieux de les voir un jour. J’espère qu’il reproduira en couleur le bouquet que tu as3 car cela est une chose de première ordre comme couleur. J’aimerais bien un jour faire une planche ou deux dans ce genre moi-même d’après mes toiles. Ainsi je travaille à un tableau dans ce moment, des femmes cueillant des olives, qui s’y prêterait je crois. Voici les couleurs, le terrain est violet et plus loin ocre jaune, les oliviers aux troncs bronze ont un feuillage vert gris, le ciel est entierement rose et 3 figurines rose aussi. Le tout dans une gamme fort discrète.4 C’est une toile que je travaille de tête d’après l’etude de même grandeur faite sur place5 parceque je veux une chôse lointaine comme un vague souvenir adouci par le temps. Il n’y a que deux notes, rose et vert, qui s’harmonisent, se neutralisent, se font opposition. J’en ferai probablement 2 ou trois répétitions car enfin c’est le résultat d’une demi douzaine d’études d’oliviers.6
Je trouve probable que je ne ferai plus guère des chôses empâtées, c’est le resultat de la vie calme de reclusion que je mène et je m’en trouve mieux. Au fond je ne suis pas si violent que cela, enfin je me sens davantage moi dans le calme.
Tu le verras peutêtre aussi dans la toile pour les Vingtistes que j’ai expediée hier, le champ de blé au soleil levant.7 En même temps tu recevras la chambre à coucher.8 J’y ai encore joint deux dessins.9 Je suis curieux de savoir ce que tu diras du champ de blé, il faudra le regarder pendant quelque temps peutêtre. Cependant j’espère que tu m’écriras bientôt si c’est arrivé en bon ordre si tu trouves une demi heure de loisir semaine prochaine.–
 1v:2
Je serais tout à fait résigné à rester ici encore l’année prochaine parceque je crois que le travail marchera un peu. Et je sens le pays ici, par le séjour prolongé, autrement que le premier endroit venu – les bonnes idées germent maintenant un peu et faudra les laisser se développer. Et ainsi je me serais si peu écarté de l’idée d’aller chercher quelque chôse dans le pays de Tartarin.10 J’ai grand désir de faire encore et les cyprès et les Alpines et faisant souvent de longues courses dans toutes les directions j’ai noté bien des motifs et connais de bons endroits pour lorsque les beaux jours viendront. Puis en changeant au point de vue des dépenses il n’y aurait guère d’avantage je crois et la réussite du travail est encore plus douteuse en changeant. J’ai reçu une lettre de Gauguin encore fort bien, une lettre bien impregnée du voisinage de la mer, je crois qu’il doit faire de belles choses un peu sauvages.11
Tu me dis de ne pas me faire trop de soucis et que de meilleurs jours viendront encore pour moi. Je dirais que ces meilleurs jours ont déjà commencés pour moi même, lorsque j’entrevois la possibilité de compléter un peu le travail de façon que tu aies une serie d’études provençales un peu senties qui se tiendront, voilà ce que j’espère, avec nos lointains souvenirs de jeunesse en Hollande et ainsi je me fais une fête de refaire encore les oliveuses pour la mère et la soeur.12 Et si je pouvais un jour prouver que je n’apauvrirais pas la famille cela me soulagerait. Car à présent j’ai toujours beaucoup de remords de dépenser de l’argent qui ne rentre pas. Mais comme tu dis, patience et travailler est la seule chance de sortir de là.
Je me le dis cependant souvent que si j’avais fait comme toi, si j’étais resté chez les Goupil, si je m’étais borné à vendre des tableaux, j’aurais mieux fait.– Car dans le commerce si on ne produit pas soi-même on fait produire les autres à present que tant d’artistes ont besoin de soutien dans les marchands et n’en trouvent que rarement.
 1v:3
L’argent qui était chez M. Peyron est épuisé et même il m’a il y a quelques jours donné 10 francs en avance. et dans le courant du mois il m’en faudra bien encore dix et je trouverais juste de donner à Nouvel an quelque chôse aux garçons de service d’ici et au concierge, ce qui fera encore une dizaine de francs.
Pour ce qui est des vêtements d’hiver, ce que j’ai n’est pas grand chôse comme tu comprendras mais c’est chaud assez et donc nous pouvons attendre jusqu’au printemps avec cela.– Si je sors c’est pour travailler donc alors je mets ce que j’ai de plus usé et j’ai un veston et pantalon en velours pour ici. Je compte au printemps, si je suis ici, aller faire quelques tableaux à Arles aussi et si vers cette époque-là je prends quelque chose de neuf cela suffira.
Je t’envoie ci-inclus une commande de toile et de couleurs mais j’en ai encore et cela peut attendre le mois prochain si celui ci serait trop chargé déjà.
Du tableau de Manet dont tu parles, je me souviens.13 un ideal de figure est pour moi toujours resté le portrait d’homme de Puvis de Chavannes, un vieillard lisant un roman jaune, ayant à côté de lui une rose et des pinceaux d’aquarelle dans un verre d’eau – et le portrait de dame qu’il avait à la même exposition,14 une femme déjà vieille mais tout à fait telle que Michelet le sentait, qu’il n’y a pas de vieille femme.15 Ce sont là des chôses consolantes, voir la vie moderne claire malgré ses inévitables tristesses.
l’année dernière vers cette époque je ne pensais certes pas que j’en reviendrais encore tant que cela.
 1r:4
Dis bien des chôses à Isaacson si tu le vois et à Bernard.
Je regrette de ne pas pouvoir de ces jours ci envoyer les oliviers mais cela sèche si mal qu’il faudra attendre.
Je crois que ce serait une bonne mesure de faire venir la soeur en Janvier. Ah si celle là se mariait ce serait une bonne chôse.
Je te serre bien la main en pensée, je vais encore travailler un peu dehors, il fait du mistral.– Vers le moment du coucher du soleil cela se calme un peu d’habitude, alors il y a des effets superbes de ciels citron pâle et les pins désolés détachent leurs silhouettes là contre avec des effets de dentelle noire exquise.
d’autres fois le ciel est rouge, d’autres fois d’un ton extremement fin, neutre, de citron pâle encore mais neutralisé par du lilas fin.
J’ai un effet de soir d’un pin encore contre du rose et du jaune vert.16 Enfin sous peu tu verras ces toiles dont la première, le champ de blé, vient de partir. à bientôt j’espère, bien des choses à Jo.

t. à t.
Vincent

translation
 1r:1
My dear Theo,
Thanks very much for your last letter,1 I’m very glad that you and Jo are in good health, and very often think of you both.
It’s very interesting what you tell me about a publication of coloured lithographs with a text on Monticelli,2 honestly, that gives me very great pleasure, and I’d be very curious to see them one day. I hope that he’ll reproduce in colour the bouquet you have,3 for that’s a thing of the first order as regards colour. One day I’d very much like to do a print or two myself in this vein after my canvases. Thus I’m working on a painting at the moment, women picking olives, which would lend itself to it, I think. These are the colours: the field is violet and further away yellow ochre, the olive trees with bronze trunks have grey-green foliage, the sky is entirely pink, and 3 small figures pink also. The whole in a very discreet range.4 It’s a canvas I’m working on from memory after the study of the same size done on the spot,5 because I want a far-off thing like a vague memory softened by time. There are only two notes, pink and green, which harmonize, neutralize each other, oppose each other. I’ll probably do 2 or three repetitions of it, for in fact it’s the result of a half-dozen studies of olive trees.6
I think it likely that I’ll do hardly any more things in impasto, it’s the result of the calm life of seclusion I’m leading, and I feel I’m better for it. Fundamentally I’m not as violent as that, anyway I feel more myself in calmness.
You’ll perhaps also see it in the canvas for the Vingtistes that I sent yesterday, the Wheatfield with rising sun.7 You’ll receive the Bedroom at the same time.8 I’ve also added two drawings to them.9 I’m curious to know what you’ll say about the Wheatfield, you may have to look at it for a while perhaps. However, I hope that you’ll write to me soon whether it’s arrived in good order if you find a free half hour next week.  1v:2
I’d be completely resigned to staying here next year too, because I think the work will get along a little. And through the prolonged stay, I feel the country here differently from the first place encountered – good ideas are now germinating a little and should be allowed to develop. And thus I wouldn’t be so very far removed from the idea of going to look for something in the land of Tartarin.10 I have a great desire to do more of both the cypresses and the Alpilles, and often going on long walks in all directions I’ve noted many subjects and know good places for when the fine days come. Then, from the point of view of expenditure there would hardly be any advantage in moving I think, and moving makes the success of the work all the more doubtful. I’ve received another very nice letter from Gauguin, a letter thoroughly impregnated with the proximity of the sea, I think he must be doing fine, rather savage things.11
You tell me not to give myself too many worries and that better days will come again for me. I’d say that these better days have already begun for myself, when I glimpse the possibility of completing, to some extent, the work in such a way that you’ll have a series of Provençal studies done with feeling which will hold up, this is what I hope, with our far-off memories of youth in Holland, and thus I’m treating myself by redoing the olive trees again for our mother and sister.12 And if I could one day prove that I wouldn’t impoverish the family, that would relieve me. For at present I always have a great deal of remorse in spending money that doesn’t come back. But as you say, patience and working is the only chance of getting out of that.
However, I often tell myself that if I’d done like you, if I’d stayed at the Goupils’, if I’d restricted myself to selling paintings, I would have done better. For in the trade, if one doesn’t produce oneself one makes others produce, now that so many artists need support among the dealers and only rarely find it.  1v:3
The money that was with Mr Peyron has run out, and a few days ago he even gave me 10 francs in advance. And in the course of the month I’ll certainly need another ten, and at New Year I’d consider it right to give something to the servant lads who work here, and to the porter, which will make another ten francs or so.
As regards winter clothing, what I have isn’t very much, as you’ll understand, but it’s warm enough and so we can wait until spring with that. If I go out it’s to work, so then I put on the most worn-out things I have, and I have a velvet waistcoat and trousers for here. In the spring, if I’m here, I’m planning to go and make a few paintings in Arles as well, and if I get something new around then, that will suffice.
I’m sending you enclosed an order for canvas and colours, but I still have some and it can wait until next month if this one is too heavily burdened already.
I remember the painting by Manet you speak of.13 As to figure, the portrait of a man by Puvis de Chavannes has always remained an ideal for me, an old man reading a yellow novel, with beside him a rose and watercolour brushes in a glass of water – and the portrait of a lady that he had in the same exhibition,14 a woman already old but completely as Michelet felt, that there’s no such thing as an old woman.15 These are consolatory things, to see modern life as bright despite its inevitable sadnesses.
Last year around this time I was certainly not thinking that I would recover as much as this.  1r:4
Give my kind regards to Isaäcson if you see him, and to Bernard.
I regret not being able to send the olive trees one of these days, but it’s drying so badly that I’ll have to wait.
I think it’ll be a good course of action to have our sister come in January. Ah, if that one could get married, that would be a good thing.
I shake your hand warmly in thought, I’m going to work some more outside, the mistral’s blowing. It usually dies down by the time the sun’s about to set, then there are superb effects of pale citron skies, and desolate pines cast their silhouettes into relief against it with effects of exquisite black lace.
At other times the sky is red, at other times a tone that’s extremely delicate, neutral, still pale lemon but neutralized by delicate lilac.
I have an evening effect of a pine again against pink and green-yellow.16 Anyway, shortly you’ll see these canvases, of which the first, the Wheatfield, has just left. More soon, I hope, warm regards to Jo.

Ever yours,
Vincent
notes
1. This was letter 825.
2. For Lauzet’s Adolphe Monticelli, see letter 825, n. 7.
3. For Monticelli’s Vase of flowers , see letter 578, n. 4. Lauzet’s publication did not include a lithograph after this painting.
4. This second version was Women picking olives (F 656 / JH 1870 ). Cf. letter 827, n. 13. Van Gogh says later on (l. 19) that he intends to make two or three repetitions. In fact he made one more repetition – Women picking olives (F 655 / JH 1869 ) – for his mother and Willemien (see n. 12 below).
5. The first study, painted on the spot, is Women picking olives (F 654 / JH 1868 ). See letter 827, n. 13.
6. These ‘half-dozen’ studies consisted of Olive grove (F 707 / JH 1857 ), Olive trees (F 708 / JH 1855 ), Olive trees (F 710 / JH 1856 ), Olive grove with two olive pickers (F 587 / JH 1853 ), Olive grove (F 586 / JH 1854 ) and Women picking olives (F 654 / JH 1868 ).
7. Wheatfield at sunrise (F 737 / JH 1862 ).
8. Vincent sent both the first version, The bedroom (F 482 / JH 1608 ), and the repetition, The bedroom (F 484 / JH 1771 ); see letter 830, in which Theo confirms receipt of the consignment.
9. Vincent probably sent drawings because Theo had asked him if he also wanted to show his drawings at the exhibition of Les Vingt (see letter 825). It is not known which two drawings he sent, but possibilities include the Wheatfield at sunrise (F 1552 / JH 1863) and The garden of the asylum (F 1545 / JH 1851), according to Pickvance in exhib. cat. New York 1986, p. 56, and Herzogenrath and Hansen in exhib. cat. Bremen 2002, p. 96, cat. no. 25. There is, however, no indication whatsoever that these are the drawings in question.
10. For Daudet’s Tartarin de Tarascon and Tartarin sur les Alpes, see letter 583, n. 9. These novels are set in Provence.
11. This was Gauguin’s letter 828.
12. The version intended for Mrs van Gogh and Willemien was Women picking olives (F 655 / JH 1869 ). See letter 827, n. 13. They probably never received the work, because it is assumed that Jo van Gogh-Bonger sold it in 1895. See Account book 2002, p. 183.
13. Theo had written about Manet’s In the garden , which the brothers had seen at Portier’s. See letter 825, n. 2.
14. For Puvis de Chavannes’s Portrait of a man (Eugène Benon) and Portrait of a woman (Maria Cantacuzène) , see letter 655, n. 10.
15. For this passage from Michelet’s L’amour, see letter 655 and letter 27, n. 2.
16. Pine trees with setting sun (F 652 / JH 1843 ). See Hendriks and Van Tilborgh 2001, p. 155 (n. 87).