1r:1
1Paris le 18 Sept_ 1889

2Mon cher Vincent,
3J’ai tardé de répondre
4à ta dernière lettre comme
5j’espérais rencontrer le père Pissarro_
6Il est reparti chez lui1 mais
7doit revenir prochainement à
8Paris. Le père Tangui & moi en
9causant de toi nous avions déjà
10remué la question s’il n’y aurait
11pas moyen de l’arrangement dont
12tu parles et alors est arrivé la
13mort de sa mère2 & n’était ce pas  1v:2
14le moment. L’année dernière
15de Haan a voulu aller chez lui &
16alors il a dit qu’il n’avait pas
17de place & a t il cherché pour lui
18chez les voisins, mais cela n’a pas
19donné de résultats. J’en ai parlé
20à Jouve qui m’a promis de voir
21s’il ne trouvait pas un arrangement
22car demeurer chez lui ne se peut pas faute de place.
23mais il a son atelier. Lui il a l’air
24de remonter sur l’eau, il a trouvé
25des travaux de décoration.3 C’est un
26homme de beaucoup de bon sens. Mais
27pour ce qui est l’essentiel, savoir
28si ta santé ira mieux quand tu
29sera chez l’un ou l’autre de ces gens/
30voilà la grande question. Quand tu  1v:3
31parles de vaincre ta maladie par
32le travail, mon vieux tu n’as jamais
33fait que cela & tu n’as donc pas besoin
34de changer pour cela. Au contraire
35la seule chose qui pourra te guerir
36c’est je crois que tu ne cherches
37rien de plus que de te fortifier
38le corps et les idées noires s’en iront
39quand tu auras un peu plus de sang
40dans le corps. J’ai peur quand tu
41travailles comme cela avec rage car
42forcément tu t’épuises. Je comprends
43que l’oisiveté te pèse surtout quand
44tu n’as pas de société à ton gout.
45mais en venant içi c’est le danger
46d’une société qui t’énerve. Je dirais/
47va à la campagne dans un coin où
48il y a quelque artiste oublié, mais  1r:4
49tu sais comme tu supportes difficilement
50le froid & tant que tu ne sois pas
51absolument mieux il faut aussi que
52tu ne sois pas seul. Selon Rivet &
53aussi selon ce que j’ai compris des
54lettres de Mr Peyron il se peut que tu
55n’auras pas de crise, mais il faut
56absolument que tu ne fasse aucune
57imprudence & que tu sois sous la
58surveillance d’un médecin. Veux tu
59venir à une maison de santé d’içi jusqu’à
60ce que l’hiver soit passé & veux tu
61après aller à la campagne pour peindre_
62Réponds moi cathégoriquement à cela.
63Pourquoi restes tu enfermé & ne vas tu
64pas prendre l’air/ cela ne pourra que te
65faire du bien, tandis qu’une vie assis
66ne vaut rien pour toi/ aussi faut-il
67que tu manges de la viande.– Tu auras
68probablement reçu les couleurs de chez
69Tasset/ pour le second envoi de blanc  2r:5
70il t’arrivera très prochainement car
71il n’en avait pas en magasin.4 Il
72y a à l’exposition trois tableaux
73de Meunier qui t’auraient fait
74plaisir de voir. L’un est une étude
75de toits rouges surmontés de cheminées
76d’usine qui toutes ont leur lourd
77panache de fumée qui se détache
78contre un ciel laiteux du matin_5
79N° 2 est un groupe d’ouvriers
80marchant deux à deux en se rendant
81à l’usine à travers des tas de scorillesa
82et de charbon/ des pieux/ des morceaux
83de noir menacent le ciel.6 N° 3
84La hercheuse. Avant de dessendre
85elle cause avec un jeune gasb. Ils sont  2v:6
86vêtus de même mais elle est bien femme/
87au-dessus de leurs têtes un gros poutre
88découpe une partie du ciel contre
89lequel ils se détachent.7 Encore celui
90là si ce n’est ni impressionniste ni
91la peinture du jour c’est beau tout
92de même/ tous les trois tableaux
93sont hissés en haut de la salle.
94Il a aussi un pudeleurc grandeur
95nature en bronze, qui ressemble à
96'une figure de Millet, très beau aussi.8
97Jo se porte bien/ elle est presqu’à la
98moitié de sa grossesse. Jusqu’à présent
99cela va bien, elle est grosse ce qui la gène
100un peu mais à part quelquefois des nausées
101cela va bien. Elle n’est plus inquiète &
102n’a pas peur. J’espère que tu vas mieux
103& que tu ne te sentes pas trop malheureux.
104Nous parlons & nous pensons souvent à toi_
105'bien bonjour de Jo & bonne poignée de mains et

106t_ à t_
107Theo


96 aussi. < aussi,
105 et > Reading uncertain.
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