Je suis bien heureux d’avoir reçu de vos bonnes nouvelles et d’apprendre que vous vous etes remis au travail.1
Comme je vous le disais en ma carte hative2 je suis installé à Cassis, un joli petit port à une heure de Marseille.– Du blanc, du bleu, de l’orangé harmoniquement dispersés dans de jolis mouvements de terrain. Tout autour des montagnes aux
1v:2 courbes rythmiques.
Je me donne beaucoup de mal. Arriverai-je à rendre le dixième de ce que je vois, j’en serais deja fort aise.
Notre Vert Veronese et notre bleu de cobalt – pas celui du brave Tanguy – hors de cause, sont de la merde à côté de ces flots mediterranéens.
Je suis bien gêné par le temps: pluie ou mistral depuis quelques jours. Je profite de ce contre-temps pour mettre à execution les planches d’un ouvrage que me fut commandé
1v:3 en collaboration avec M. Ch. Henry (peut-etre en la Revue Independante avez vous lu certains des articles de mon collaborateur) par la librairie de l’Art.–3
C’est un livre sur l’esthetique des formes, dont un instrument – le rapporteur esthetique de C. Henry – permet d’étudier les mesures et les angles. On voit alors si la forme est harmonieuse ou pas.–
Cela aura une grande portée sociale au point de vue surtout de l’art industriel. Nous apprenons à voir juste et beau aux ouvriers apprentis, etc. dont jusqu’ici on n’a fait l’education esthetique
1r:4 qu’au moyen de formules empiriques et de conseils malhonnetes ou niais. Je vous adresserai une de ces brochures lorsqu’elles auront vu le jour.
Pourquoi ne viendrez vous pas faire une etude ou deux en ce joli pays.
Tres souvent, n’est-ce pas, de vos bonnes nouvelles.–