merci de ta bonne lettre ainsi que du billet de 50 francs.–
Je ne trouve pas jusqu’à présent la vie ici aussi avantageuse que j’eusse pu l’espérer,1 seulement j’ai trois études de faites2 ce qu’à Paris de ces jours-ci probablement je n’aurais pas su faire.
J’étais content de ce que les nouvelles de la Hollande étaient assez satisfaisantes. Pour ce qui est de Reid je serais peu étonné de ce qu’– (à tort pourtant) – il prît de mauvaise part que je l’aie dévancé dans le midi.3 Dire de notre part que nous n’aurions jamais eu avantage à le connaître serait relativement injuste puisque 1° il nous a fait cadeau d’un très-beau tableau (lequel tableau soit dit entre paranthèses on avait l’intention d’acquérir)4, 2° Reid a fait monter les Monticelli de valeur et puisqu’on en possède 5 il en résulte pour nous que ces tableaux ont haussé en tant que valeur5 – 3 il a été de bonne et agréable compagnie dans les premiers mois.–6
Maintenant de notre côté on a voulu le faire participer à une affaire plus importante que celle des Monticelli et il a fait semblant de n’y pas comprendre grand-chôse.7
Il me semble que pour avoir davantage encore le droit de rester maîtres de notre terrain en tant que quant aux impressionistes – pour qu’il n’y puisse avoir de doute concernant notre bonne foi à l’égard de Reid – on pourrait le laisser agir sans intervenir comme bon lui semblera pour les Monticelli de Marseille. Insistant sur ceci que les peintres décédés ne nous intéressent qu’indirectement au point de vue argent.
Et si tu es d’accord en ceci, à la rigueur tu peux de ma part aussi lui dire que s’il a l’intention de venir à Marseille pour y acheter des Monticelli il n’a rien à craindre de notre part mais qu’on a le droit de lui demander ses intentions à cet égard vu qu’on l’a dévancé sur ce territoire.–
Pour les impressionistes – il me semblerait juste que ce soit par ton intermediaire sinon par toi directement qu’ils soient introduits en Angleterre.– Et si Reid prenait les devants on aurait le droit de le considérer comme ayant agi envers nous de mauvaise foi, à plus forte raison depuis qu’on lui auraita laissé libre pour les Monticelli de Marseille.
Tu rendrais sûrement service à notre ami Koning en le laissant resterb avec toi8 – sa visite chez Rivet doit lui avoir prouvé que ce n’est pas nous qui l’ayons mal conseillé.9
En cas que tu voudrais le prendre – et il me semble que ce serait un debrouillage pour lui, seulement il faudrait clairement s’expliquer avec le père10 de façon que tu n’aies pas de responsabilités, indirectes mêmes.–
Si tu vois Bernard dis lui alors que jusqu’à présent j’ai à payer plus cher qu’à Pont aven11 mais qu’ici je crois qu’en restantc en garni avec les bourgeois il doit y avoir des économies à faire, ce que je cherche, et dès que j’aurai vérifié je lui écrirai ce qui me paraîtra la moyenne des dépenses.
Il me semble par moments que mon sang veuille bien plus ou
1r:4 moins se remettre à circuler, cela n’ayant pas été le cas dans les derniers temps à Paris, je n’en pouvais véritablement plus.–
Il faut que je prenne mes couleurs et mes toiles soit chez un épicier soit chez un libraire,12 qui n’ont pas tout ce qui serait désirable. Il faudra bien que j’aille à Marseille pour voir comment l’état de ces chôses serait par là. J’avais espérer trouver du beau bleu &c. et en somme je n’en désespère pas vu qu’à Marseille on doit pouvoir acheter les matières brutes de première main. Et je voudrais pouvoir faire des bleus comme Ziem – qui ne bougent pas tant que les autres, enfin nous verrons.–
Ne t’embêtes pas et donne une poignée de main aux copains pour moi.
b. à t.
Vincent
les etudes que j’ai sont une vieille femme Arlesienne, un paysage avec d.l. neige, une vue d’un bout de trottoir avec la boutique d’un charcutier.–13 Les femmes sont bien belles ici, c’est pas une blague14 – par contraire le musée d’Arles est atroce et une blague et digne d’etre à Tarascon15 – il y a aussi un musee d’antiquités,16 vraies celles-là.