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Mon cher Theo & chère Jo.
de ces premiers jours ci certes j’aurais dans des conditions ordinaires espéré un petit mot de vous déjà. Mais considérant les chôses comme des faits accomplis – ma foi – je trouve que Theo, Jo et le petit sont un peu sur les dents et éreintés – d’ailleurs moi aussi suis loin d’etre arrivé à quelque tranquilité. Souvent, très souvent je pense à mon petit neveu – est ce qu’il va bien. Jo voulez vous me croire – si cela vous arrive de nouveau, ce que j’espère, d’avoir encore d’autres enfants – ne les faites pas en ville, accouchez à la campagne et restez y jusqu’à que l’enfant aye 3 ou 4 mois. A présent – il me semble que l’enfant n’ayant encore que 3 mois, déjà le lait devient rare, déjà vous etes comme Theo fatiguée trop.
Je ne veux pas dire du tout éreintée mais enfin les ennuis prennent trop de place, sont trop nombreux et vous semez dans les épines.1 C’est pourquoi que je vous donnerais à penser de ne pas aller en Hollande cette année ci, c’est très très couteux toujours le voyage et jamais cela a fait du bien. Si, cela fait du bien si vous voulez à la mère qui aimera à voir le petit – mais elle comprendra et préférera le bien être du petit au plaisir de le voir. D’ailleurs elle n’y perdra rien, elle le verra plus tard. Mais – sans oser dire que ce soit assez – quoi qu’il en soit il est certes préférable que père, mère et enfant prennent un repos absolu d’un mois à la campagne.
D’un autre côté moi aussi je crains beaucoup d’être ahuri – et trouve étrange que je ne sache aucunement sous quelles conditions je suis parti – si c’est comme dans le temps à 150 par mois en trois fois – Theo n’a rien fixé et donc pour commencer je suis parti dans l’ahurissement.–2
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Y aurait-il moyen de se revoir encore plus calme – je l’espère. mais le voyage en Hollande, je redoute que ce sera un comble pour nous tous.
Je prévois toujours que cela fait souffrir l’enfant plus tard d’être élevé en ville. Est ce que Jo trouve cela exagéré. Je l’espère mais enfin je crois que pourtant il faut être prudent. Et je dis ce que je pense parceque vous comprenez bien que je prends de l’intérêt à mon petit neveu et tiens à son bien être; puisque vous avez bien voulu le nommer après moi, je desirerais qu’il eût l’âme moins inquiete que la mienne. qui sombre.
Parlons maintenant du Dr Gachet. J’ai été le voir avant hier, je l’ai pas trouvé.
De ces jours ci je vais très bien, je travaille dur et ai quatre études peintes et deux dessins.3
Tu verras un dessin d’une vieille vigne avec une figure de paysanne. Je compte en faire une grande toile.
Je crois qu’il ne faut aucunement compter sur le Dr Gachet. D’abord il est plus malade que moi à ce qu’il m’a paru, ou mettons juste autant, voilà. Or lorsqu’un aveugle mènera un autre aveugle, ne tomberont ils pas tous deux dans le fossé.4
Je ne sais que dire. Certes ma dernière crise, qui fut terrible, était due en considérable partie à l’influence des autres malades,5 enfin, la prison m’écrasait et le pere Peyron n’y faisait pas la moindre attention, me laissant vegeter avec le reste corrompu profondément.
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Je peux avoir un logement, 3 petites pieces à 150 par an. Cela si je ne trouve pas mieux, et j’espère trouver mieux, en tout cas est preferable au trou à punaises chez Tanguy6 et d’ailleurs j’y trouverais un abri moi-meme et pourrais retoucher les toiles qui en ont besoin. De telle facon les tableaux s’abimeraient moins et en les tenant en ordre la chance d’en tirer quelque profit augmenterait. Car – je ne parle pas des miennes – mais les toiles Bernard, Prevot,7 Russell, Guillaumin, Jeannin qui s’etaient egarés là – c’est pas leur place.8
Or des toiles comme celles là – encore une fois des miennes je ne parle pas – c’est de la marchandise qui a et gardera une certaine valeur et la negliger c’est une des causes de notre gène mutuelle.
Cela m’attriste bien un peu de devoir insister sur ce que tu m’envoies une partie au moins de mon mois dès le commencement. Mais je ferai encore mon possible de trouver que tout va bien.
Il est certain je crois que nous songeons tous au petit et que Jo dise ce qu’elle veut, Theo comme moi j’ose croire se rangeront à son avis. Moi je ne peux dans ce moment que dire que je pense qu’il nous faut du repos à tous. Je me sens – raté – voilà pour mon compte – je sens que c’est là le sort que j’accepte. et qui ne changera plus. Mais raison de plus, mettant de côté toute ambition nous pouvons des années durant vivre ensemble sans nous ruiner de part ou d’autre. Tu vois qu’avec les toiles qui sont encore à St Remy, il y en a au moins 8,9 avec les 4 d’ici je cherche à ne pas perdre la main. Cela c’est absolument pourtant  1r:4 la vérité, c’est difficile d’acquerir une certaine facilité de produire et en cessant de travailler je la perdrais bien plus vite, plus facilement que cela m’aie coûté de peines pour y arriver. Et la perspective s’assombrit, je ne vois pas l’avenir heureux du tout.
Ecris moi par retour si tu n’as pas encore écrit et bonnes poignées de main en pensee, j’espererais qu’il y eût une possibilité de se revoir bientot à têtes plus reposées.

Vincent.

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